Il s’agira tout d’abord de prendre l’entière mesure de l’éclat qui entoure cette série de onze épîtres s’exhibant comme le tour de force d’un auteur en pleine maîtrise de son art. Si l’on conçoit que, dans cette perspective, l’épître de Maguelonne puisse être envisagée comme un poème de jeunesse prolongeant le souvenir d’une pratique dépassée, que dire de l’épître « À son ami Lyon », située à l’extrême fin de la section, mais évoquant la situation de Marot prisonnier par le moyen indirect d’une fable ésopique ? Sur la mise en scène poétique de l’accès du poète à l’âge des responsabilités, voir Guillaume Berthon, L’Intention du poète. N’oublions pas en effet que l’idée de maturation est inscrite au cœur même du programme déterminé par le titre et l’appareil liminaire du recueil18. 9 Pour un examen plus général des pièces de sollicitation, voir O. Rosenthal, « Clément Marot : une poétique de la requête », dans G. Defaux (dir. Rosenthal, Olivia. 3 Elle-même placée après la requête plus conventionnelle de l’Epistre du Despourveu. Certains traits caractéristiques de la poésie de Marot résultent de la tension entre sa situation de poète pensionné, soumis aux contraintes inhérentes à son statut, et sa volonté de faire entendre la voix d'une conscience gagnée aux idéaux erasmiens ou evangeliques et convaincue du pouvoir de la poésie. Bourgeon commence en effet par déclarer : « A vous me plaings » (v. 3) ; et Raisin raconte sa « male adventure » (v. 6), exprime son « grand dueil » (v. 68). par Clément Marot. À l’intérieur de ces catégories, les types sont tout aussi divers : épître de déclaration amoureuse, de requête, de lamentation, d’encouragement, de réponse aux critiques, épître jocosa de plaisanterie… Marot offre à son lecteur un vaste échantillonnage témoignant de sa maîtrise des codes épistolaires. C’est encore un espoir qu’expriment les deux vers conclusifs, Marot achevant par là d’inscrire l’épître à la Demoiselle négligente dans une logique d’attente conforme à Ferme Amour17. À notre connaissance, aucun critique ni éditeur moderne de Marot n’a su lire cette équivoque sur « aller à pied » et « dé-mûrir/demeurer ». Francis Goyet, Paris, Livre de Poche, 1990, p. 124). Qui t’a induit à faire / Emprisonner depuis six jours en çà / Un tien ami, qui onc ne t’offensa ? Loin d’occasionner une répétition inutile, la bascule entre le premier texte, qui présente le point de vue de l’historiographe, et le second, où le poète abandonne sa posture officielle pour se présenter sous un èthos à la fois accablé et confiant, participe à l’individualisation du discours épistolaire, donc à sa familiarisation. Dans la « Petite épître au Roi », Marot feint d’adopter la posture d’un poète de cour payant son protecteur de mots, pour mieux la détruire de l’intérieur et faire éclater son audace sociale et formelle32. 16 Sur la capacité de la lettre à rapprocher les correspondants soit en estompant la distance qui les sépare soit en déplaçant l’ancrage géographique et énonciatif de l’épistolier, voire celui du destinataire, voir Jean Lebel, « Littérature de voyage et genre épistolaire au XVIe siècle », Bulletin de l’Association Guillaume Budé, 2 (2000), p. 175-192. Argumentum est ficta res, quae tamen fieri potuit. Paris : Librairie générale française, 2005 (2e éd. Paris : Classiques Garnier, 1990 (t. I) et 1993 (t. II). 23 Quintilien associe ainsi le sermo et l’epistula dans son analyse du fonctionnement de la prose relâchée : « Donc, avant tout, il y a une prose à contexture liée et serrée, et une autre libre, comme celle de la conversation et de la correspondance, à moins qu’elles ne traitent un sujet au-dessus de leur niveau naturel, philosophie, politique ou matières analogues » (« Est igitur ante omnia oratio alia vincta atque contexta, soluta alia, qualis in sermone et epistulis, nisi cum aliquid supra naturam suam tractant, ut de philosophia, de re publica similibusque », Institutio Oratoria, IX iv 19, trad. 2019 (à paraître). Éd. Gardons-nous donc de prendre au sérieux « l’effet de réel » que le caractère pseudo-référentiel et l’énonciation personnelle de l’épître familière tendent à produire : Marot nous avertit ici que les épîtres de L’Adolescence clémentine doivent être lues pour ce qu’elles sont, c’est-à-dire des narrations poétiques enveloppant le réel d’un tissu fabuleux. Liminary texts to the Psalms (two epistles, one epigram) Two dedicatory epistles (and an epigram) accompany Marot’s Psalm poems. Délimitée par des repères péritextuels clairs, formellement harmonisée et soutenue par une architecture rhétorique imitée de l’épistolographie en prose, l’épître marotique atteint, malgré sa variété énonciative et typologique, une stabilité digne des formes poétiques les mieux établies. « L’espée Sainct Pol » apparaît en outre en registre militaire, dans l’Epistre du Camp d’Attigny à ma Dicte Dame d’Alençon (dans L’Adolescence clémentine, OP1, p. 78-82, v. 97). de François Charbonnier, Paris, Simon Du Bois pour Galliot Du Pré, 1527. 12Les repères intratextuels mis en place par le poète, s’ils sont moins immédiatement repérables, n’en contribuent pas moins à établir, pour l’ensemble de la section, un soubassement rhétorique déterminant pour l’illustration du genre épistolaire. Ces détails rappellent l’importance de la salutation dans la rhétorique épistolaire : première partie de la lettre, elle sert à établir la nature exacte des relations liant l’expéditeur au destinataire (est-il supérieur, inférieur ou égal à l’épistolier ?) McKinley, Mary B. L’analogie entre le moi du poète et la substance de la lettre est mise en place dès la fin de l’épître du « Dépourvu ». 30Entre deux correspondants aussi socialement éloignés que le sont Marot et Marguerite de Navarre, une telle familiarité n’est jamais donnée. L’École des rhétoriqueurs, Genève, Slatkine, 1998, p. 105-112. Christine Martineau‑Génieys. 4 Dans le Quintil horatian, Marot est ainsi le seul auteur moderne, avec Jean Lemaire de Belges, à être cité par Barthélemy Aneau lorsqu’il recense les auteurs épistoliers. 19 Si la chronologie semble être un des critères d’agencement des épîtres marotiques, d’autres principes d’organisation moins immédiatement évidents viennent compléter ce classement général. 10 Dans les traités d’épistolographie du XVIe siècle, les différents types de lettres sont regroupés selon les trois genres traditionnels de la rhétorique. Ils allient figuration symbolique et requête concrète, créent un mélange de plaisir complice et de distanciation réflexive, réflexivité également suscitée par une symétrie de structure dont le détail amène à parler de diptyque. Fontenay Saint-Cloud : ENS éditions, 1997. p. 53-71. Paris : Classiques Garnier, 2014. Cette série se trouvant placée juste après les traductions et les poèmes de forme longue qui inaugurent le volume de L’Adolescence clémentine, l’épître constitue le premier genre à être mis en vedette dans l’économie du recueil, au détriment des formes mieux établies ou plus prestigieuses du rondeau, de la ballade et du chant royal. « La plume en l’absence », Le devenir familier de l’épître en vers dans les recueils imprimés de poésie française (1527-1555). Thèse de doctorat sous la direction de Michel Magnien (Paris Sorbonne Nouvelle, 2017). Contrairement toutefois à ce qui se produit pour les formes de l’élégie, du blason, de l’étrenne ou encore du sonnet, que le « Prince des Poetes » a largement contribué à installer dans le champ poétique français mais qu’il a peu ou prou abandonnées après un premier « coup d’essay » retentissant, Marot prolonge pour l’épître son geste inaugural en continuant, tout au long de sa carrière et jusque dans l’exil final, de cultiver le genre sous sa forme personnelle. Le Sublime du « lieu commun » : l’invention rhétorique dans l’Antiquité et à la Renaissance. Entre le poète et son genre de prédilection s’établit ainsi une affinité ontologique, tous deux se dérobant en effet sous le jeu de la fiction en même temps qu’ils se donnent par le moyen de la familiarité. 12 Sur les artes dictaminis, ces traités de première rhétorique destinés à l’apprentissage par les clercs de l’art épistolaire et diffusés dans toute l’Europe du XIe jusqu’au XVe siècle, voir l’étude fondatrice de James J. Murphy, Rhetorics in the Middle Ages, a History of Rhetorical Theory from St Augustine to the Renaissance, Berkeley-LA-Londres, University of California Press, 1974. 9 Mireille Huchon, « Rhétorique de l’épître marotique ». 14 C’est le contraire d’Enghien qui semble promis à porter fruit selon l’Epistre envoyée par Clement Marot à Monsieur D’Anguyen, Lieutenant pour le Roy de là les Montz (OP2, p. 707-709) datant de 1544. Sur la notion de fruition en rapport avec la production du sens, voir T. Cave, Cornucopia, Figures de l’abondance au XVIe siècle, tr. 7Puisque le mot « bourgeon » est spécialement utilisé au XVIe siècle pour désigner une jeune pousse de vigne16, le lien onomastique entre les deux épîtres renforce le rapport symbolique ébauché entre deux étapes symétriques d’une vie de service, militaire ou autre. 31 Pour un éclairage de la portée évangélique de l’épître « À la Demoiselle négligente », voir Francis Goyet, « Sur l’ordre de L’Adolescence clémentine », p. 600-601. Couleurs de l’éloge et du blâme chez les grands rhétoriqueurs, Paris, Champion, 1994, p. 324. G. Morel, Paris, Macula, 1997, p. 72-79 en particulier. L’énumération mise en scène par Marot repose en effet sur l’exclusion réciproque des thèmes traités, chacun se trouvant enfermé dans les bornes d’un seul vers, de même qu’ils s’incarnent en poésie dans certains genres prédéterminés : rondeaux amoureux, vastes sommes héroïques, chants royaux édifiants, allégories satiriques. / Tout sarment qui est en moi et qui ne porte pas de fruit, il le retranche ; et tout sarment qui porte du fruit, il l’émonde, afin qu’il porte encore plus de fruit. C’est Marot qui introduit le premier le sonnet en France, repris ensuite par les poètes de la Pléiade, et qui est à l’origine d’un nouveau genre poétique, le blason, courte poésie vantant (ou non) une partie du corps de la femme. Les Epitres Clément Marot. 11Les « raisins » ayant traditionnellement un sens sexuel, de même que la boiterie suggère une impuissance relative, on décèle entre les deux poèmes un renversement de virilité ou de puissance générative, à interpréter en termes plus généraux. Les Épîtres, Clément Marot, Claude-Albert Mayer, Nizet. 12La vigne qui se flétrit sans porter fruit, crainte explicite de Bourgeon, telle est précisément la piteuse histoire du capitaine Raisin, persona qui figure l’excès comme Bourgeon le défaut26. Jean Cousin, Paris, Les Belles Lettres, 1978, t. V, p. 236). Le recours au style simple et à des narrations enjouées, la mise en scène d’une transparence énonciative visant à rapprocher l’écriture de la parole, tous ces traits maintes fois relevés lorsqu’il s’agit de caractériser l’écriture marotique, auraient trouvé dans l’épître personnelle un terrain particulièrement propice à leur développement. 5 Pour Corinne Noirot, c’est ainsi comme « maître épistolier » que Marot a été consacré par l’histoire littéraire (« Entre deux airs » : style simple et ethos poétique chez Clément Marot et Joachim Du Bellay, 1515-1560, Paris, Hermann, 2013, p. 166). Usus, fructus, abusus sont des termes à la fois juridiques et théologiques ; dans la mouvance augustinienne, Érasme en discute dans son Enchiridion (cité par U. Langer, Perfect Friendship : Studies in Literature and Moral Philosophy from Boccaccio to Corneille, Genève, Droz, 1994, p. 105). Peut-être aussi une sorte d’incompréhension post-mallarméenne censure-t-elle la lecture, nie péremptoirement la possibilité de l’équivoque, perçue comme indigne d’un grand poète22. 13La perte ou la déperdition d’énergie vitale dont est victime Raisin forme ainsi le contre-modèle du désir modeste de Bourgeon, quoique celui-ci espère ironiquement devenir raisin. aussi les soldats à dos de mule du rondeau XXXIII. 12 Cf. Le passage évoque le Temple de Cupido, poème dans lequel les treilles de Priapus (voûtes du temple) étaient pleines de bourgeons et de raisins : « Là dependent tant seullement / Bourgeons, & raisins à plaisance, / Et pour en planter abondance, / Bien souvent y entre Bacchus, / A qui Amour donne puissance, / De mettre guerre entre bas culz » (v. 277-282). 57, n° 4, 2003, p. 463-474. 14Dans le diptyque des épîtres de Bourgeon et Raisin, l’équivoque sert donc de divertissement et d’avertissement au lecteur en montrant un ethos empreint de bonne humeur, une présence auctoriale qui, par le détour de la persona, met en perspective la tentation courtisane qui le concerne directement, dans le service de plume et non d’épée même s’il critique au passage le grand gâchis guerrier. Clément Marot - Petite épître au roi. Marot, Clément. Dans l’édition princeps, ces poèmes suivent la célèbre Petite epistre au Roy, qui met en scène par la fable un rapport de service mutuel3. 20 Mary McKinley, « Marot, Marguerite de Navarre et “L’Epistre du Despourveu” ». encore aujourd’hui, les « pommes sûres »), donc comme les raisins verts… « Tout homme qui mangera des raisins verts, ses dents en seront agacées », dit Jérémie 31, 30 (omnis homo qui comederit uvam acerbam obstupescent dentes eius), en une prophétie de l’alliance nouvelle où chacun subira les conséquences de ses propres péchés. Clark, John E. « Marot and Fabri’s Rhetoric of Letters. Clément Marot : nouveaux horizons de la poésie et du poète à la Renaissance. URL : http://journals.openedition.org/babel/5707 ; DOI : https://doi.org/10.4000/babel.5707, Sorbonne NouvelleFIRL - Formes et Idées de la Renaissance aux Lumières (EA 174). 6, 17, passage sur le combat spirituel, l’armure de l’amour de Dieu contre les esprits du mal. La Lettre familière au XVIe siècle : rhétorique humaniste de l’épistolaire. 39 Clément Marot, L’Adolescence clémentine, p. 202-203. Paris-Genève : Champion-Slatkine, 1987. Aux vers 82-88 de l’épître du « Dépourvu », Marot a recours à la rime sénée pour figurer une crise momentanée de l’écriture que le poète ne peut surmonter sinon en s’engageant sur un nouveau chemin poétique20. On peut ainsi évoquer le cas de l’épître du « camp d’Attigny », dont l’objet principal est de donner à Marguerite d’Alençon des nouvelles de son époux et qui développe par conséquent une longue narratio décrivant la vie des soldats engagés dans la campagne de Hainaut15. Cultures, identités, appartenances, Polichinelle, patrimoine immatériel de notre temps, Littératures et arts contemporains : l’hybridité à l’œuvre, Paysages méditerranéens – Correspondances poétiques, Horizons des mondes méditerranéen et atlantique : imaginaires comparés, Renverser la norme : figures de la rupture dans le monde hispanique, Images de la folie au tournant du Moyen Âge et de la Renaissance, Univers fictionnels dans le monde hispanique, Le Moyen Âge mis en scène : perspectives contemporaines, Figures de la disparition dans le monde hispanique et latino-américain, Regards culturels sur les phénomènes migratoires, Le voyage initiatique, découvertes, rencontres, expériences en montagne (XVII, Portail de ressources électroniques en sciences humaines et sociales, Déconstruction et reconstruction des codes épistolaires, L’entrelacement inédit du poétique et du familier, http://saprat.ephe.sorbonne.fr/revue-en-ligne-camenae-16.htm, licence Creative Commons Attribution - Pas d'Utilisation Commerciale - Pas de Modification 4.0 International, Sélection des articles et instructions aux auteurs, Catalogue des 552 revues. 3En 1532, Clément Marot est ainsi le premier poète de langue française à faire le choix de rassembler des épîtres majoritairement personnelles dans une section entièrement dédiée au genre épistolaire. James J. Murphy. Par son caractère indirect, une telle confidence témoigne avec force de l’exigence à laquelle le poète soumet le lien de familiarité s’établissant à la faveur de l’épître. Gérard Defaux. » Paris : Champion, 1994. Mais l’échange entre interlocuteurs masculins, l’acte de publication, et la surdétermination en diptyque invitent à un dépassement de la rhétorique de la requête, lettre du texte, d’autant plus que la littéralité criante de la formulation invite à interprétation19. La variété de la série se manifeste tout d’abord sur le plan visuel. 32En définitive, le parti pris original de Clément Marot pour le genre de l’épître enclenche, au sein de L’Adolescence clémentine, un processus visible d’affermissement du genre épistolaire. les « vrais » Gaulois de la ballade IX de L’Adolescence clémentine : De l’Arrivée de Monsieur d’Alençon en Haynaut (OP1, p. 120-121), qui fondront sans problème sur ces grossiers gens du nord, lesquels en ont après nos vins, eux qui n’ont que leurs piteuses bières…. Séquence 1 Séance 5 : lecture analytique du texte de Marot, "Petite épître au Roi", 1518 Première approche: De l’épître comme art poétique Composée en 1518 (il a 22 ans et son père est valet de chambre du roi), cette épître s’inscrit en 7ème position dans le … 11 On songe aussi au fameux « Et en pleurant tasche à vous faire rire » de l’épître Au roy, pour avoir esté desrobé, où le principe de subversion de la plainte par l’humour s’exerce à plein (v. 68, Suite de l’Adolescence clémentine, OP1, p. 320-323 ; composition fin 1531). 17 La figuration par équivoques à sens proverbial et moral se matérialise de manière frappante dans l’esthétique des rébus de Picardie, diffusés dans toute l’Europe fin XVe/début XVIe – outre le fait que le dédicataire était partiellement d’origine picarde comme on l’a remarqué supra ; voir J. Céard et J.-Cl. Or, tandis que cette dernière se rattache à l’éloquence publique, le sermo relève de la sphère privée et se déploie donc plus volontiers à l’égard d’un familier. L’habitude moderne de séparer le rire bas ou populaire de toutes ambitions poétiques, morales ou spirituelles nous empêche de voir le plus « gros », le double sens évident. Selon la triade cicéronienne, ce terme désigne toutes les narrations fictives qui ne prétendent pas être vraies, par opposition à l’historia qui expose des événements dont elle garantit la véracité, et à l’argumentum, auquel échoit la fiction vraisemblable37. Vu sous cet angle, et en lisant les deux épîtres comme un tableau historié, une séquence narrative en deux volets, on entend que la guerre – à laquelle se destinent logiquement deux capitaines – livre une prometteuse et verte jeunesse (quoique nécessiteuse et naïve : cas de Bourgeon) aux mains des courtisanes vérolées et des affreux Turcs (cas de Raisin) qui les épuisent, les dévitalisent, les dévirilisent. ), Rébus de la Renaissance. Le critique ne voit là qu’« obscénité voilée », jeu qui n’a « ni queue ni tête ». Fort de cette assise, il déconstruit via la succession des épîtres les codes poétiques et épistolaires de la génération précédente pour leur substituer un modèle familier. Cf. 26Les poèmes cinq et six poursuivent ce jeu de masques : l’épître « À la Demoiselle négligente » et celle des « jarretières blanches » empruntent des schémas amoureux topiques, l’absence de la dame d’une part, le fait de porter les couleurs de son amante de l’autre, mais cachent respectivement un message évangélique – les amants qui attendent la demoiselle forment une communauté de croyants unis dans l’espérance de la paix31 – et une intention parodique – la fermeté affichée par l’amant s’épuisant en effet dans la couleur de sa livrée.